Quel honneur d’être le parrain de la troisième édition du prix JeanFrançois Prat. Un prix qui porte le nom et la passion viscérale d’un homme pour les arts, un prix qui défend la peinture et soutient l’avantgarde.
Cet honneur revient au musée d’Art Moderne de la Ville de Paris dont je préside depuis un an la Société des Amis et à laquelle Jean-François fut continûment un généreux contributeur. Comment ne pas se souvenir de son exceptionnelle intelligence ? Comment oublier sa pétillante vivacité ? Jean-François avait cette pétulance d’esprit qui vous séduit, vous éblouit, littéralement. Il avait l’élégance de ceux qui pensent et réfléchissent le monde, le futur. L’art aiguisait l’acuité de sa vision. Sa curiosité traversait sans frontière le cinéma, la musique baroque ou le combat esthétique et politique d’un Pierre Boulez. Et collectionner marquait, je le crois, son insatiable appétit d’apprendre. Apprendre à sentir, apprendre à comprendre son époque et les transformations qu’elle opère.
Je me figurais en écrivant ces lignes, l’œil de Jean-François, l’œil du collectionneur qui cherche, inlassablement, la beauté, des chocs, des idées. L’émotion est affaire de savoir et d’instinct, d’acquis et d’inné. J’imaginais les fulgurances de ses raisonnements qui devaient, bien sûr, animer ses choix. De Joaquín Torres-García à Matthew Day Jackson ou Erwin Olaf en passant par Lucio Fontana, Jean Dubuffet et John Baldessari. Une collection est toujours une collection d’histoires et une monographie intime. Celle de Jean-François et Marie-Aline Prat est une aventure intellectuelle guidée par l’exigence, l’audace et une fidélité sans faille aux artistes. Je pense à Martin Barré, figure majeure de l’abstraction longtemps sous-estimée, et à l ’ardeur constante avec laquelle Jean-François a défendu son travail. L’homme avançait sans crainte, balayant d’un revers, conformismes et censures. Il pensait les artistes comme des éclaireurs, des pionniers et vivait à côté, tout près des œuvres. Partout, dans son appartement, dans son bureau, sa collection l’entourait. Et je suis certain qu’il devait, face à elle, faire de grands voyages.
Cette année, la sélection des trois nommés pour le prix Jean-François Prat est internationale, comme le reflet de l’ouverture du cabinet français Bredin-Prat sur le monde. Rezi Van Lankveld (Hollande), Zander Blom (Afrique du Sud) et Stelios Faitakis (Grèce) présentent des œuvres profondes par les idées qu’elles portent et passionnantes dans leur réalisation. Et confirment l’extrême vigueur de la peinture contemporaine.
Quelle idée magnifique que ce prix ! Que les associés de Jean-François Prat et sa famille en soient vivement remerciés.
Christian Langlois-Meurinne est Président de Ancelle & associés, gérant commandité de IDI et Président des Amis du Musée d’art Moderne de la Ville de Paris. Ancien élève de l’Ecole Polytechnique et titulaire d’un MBA de Harvard, il a 30 ans d’expérience au travers de l’IDI dont il a conduit le rachat en 1987. Il a été précédemment Directeur des industries chimiques, textiles et diverses au Ministère de l’Industrie entre 1979 et 1982.